Comme cadeau de rentrée
2013, je me suis offert l’apprentissage de la thérapie EMDR ("Eye Movement Desensitization and Reprocessing"). Il s’agit d’un algorithme humain pour désensibiliser et retraiter de
manière adaptative une information traumatique stockée sur un mode
dysfonctionnel dans notre mémoire. Bref, transformer un événement passé "qui ne
passe pas" en un souvenir digéré et accessible sereinement.
Laissez-moi en toute
naïveté vous partager ici mon enthousiasme pour ce qui manquait jusqu’à présent
dans ma boîte à outils thérapeutiques. Sur la forme, la thérapie EMDR est une
synthèse réussie de la rigueur méthodologique et diagnostique propre aux
approches (neuro)cognitives et comportementales, d'une part, et de la créativité communicationnelle
et interpersonnelle spécifique à l’hypnose clinique, d'autre part. Sur le fond, la thérapie
EMDR désamorce et déprogramme des syndromes traumatiques résistants à d’autres
thérapies brèves.
La thérapie EMDR est
structurée en 8 étapes-clefs, selon un protocole strict et standardisé qui en
constitue l’architecture de base et qui intègre les aspects cognitifs,
émotionnels et corporels. La thérapie EMDR est reconnue depuis août 2013 par l’Organisation mondiale de la Santé comme thérapie appropriée pour le traitement des
troubles de stress post-traumatique (PTSD), ces événements ponctuels et isolés,
d’origine humaine ou naturelle, qui font basculer une vie.
A côté de ces traumas avec
un grand "T", la thérapie EMDR est aussi pratiquée pour la gestion rétrospective
des climats toxiques et des contextes tordus de maltraitance morale, verbale ou
physiologique. Il s'agit de surmonter – après y avoir survécu – ces comportements ou manquements
répétés et prolongés d’abandon, d'intrusion, d'imprévisibilité, de dévalorisation,
de privation, d'abus ou d'humiliation, parfois si précoces, qui font le lit honteux des
traumatismes complexes, psychiques ou physiques.
Le principe actif de la
thérapie EMDR est de relancer, en le stimulant, notre système spontané
d’auto-guérison, lequel s’est enrayé face à une situation inhabituelle où nous
nous sommes sentis littéralement submergés, privés de nos capacités de réaction
habituelles. Recouvrer nos compétences d’action, c’est réparer ce dont nous avons
manqué à l’époque et nous délivrer – enfin – de l’empreinte, laissée inconsciemment
dans notre cerveau et dans notre corps, de s’être vécu mort.
Récupérer pour l’avenir notre
plein pouvoir sur soi et jouir à nouveau des sentiments de responsabilité, de
sécurité et de libre-choix qui y sont associés passent par revivre l’horreur
d’alors (en gardant un pied ferme dans un environnement aujourd’hui sécurisé et
stabilisé par la relation thérapeutique) pour transformer de manière heureuse l’issue de l’histoire
initiale et se réconcilier avec cette partie de nous-mêmes que l’on avait
laissée pour morte à l’intérieur de soi. Un peu comme si Harry Potter regardait,
confortablement installé à l’abri de la fenêtre du Poudlard Express, les
Détraqueurs rôder autour de sa propre dépouille, avant de leur jeter un puissant
Patronus et se sauver lui-même de leur emprise.
Alors, comment la thérapie
EMDR s’inscrit-elle dans ma pratique d’hypnothérapeute ? L’hypnose clinique permet de recruter et d’amplifier les ressources spontanées de sécurité et
d’auto-immunité du client. Je l’utilise aussi à des fins de
reparentalisation, en facilitant et en encourageant le dialogue des parties adultes
et enfants à l’intérieur du système familial du client. Enfin, les progressions vers le futur ou
régressions dans le passé reconstruisent et renforcent les scénarios
thérapeutiques, ces tissages cognitifs qui tressent les chemins de l’autonomisation et de l’individuation de la
personne.
En complément et en
alternative à ce cocon de sécurité émotionnelle et aux voies de la réalisation du Soi, la
thérapie EMDR me sert de scalpel laser pour réduire de manière focalisée et par
confrontation directe des nœuds traumatiques résistants aux baumes de soins
déposés sur les enveloppes psychiques lacérées ou fragmentées. Les résultats
obtenus en mon cabinet de consultation (rapidité, acuité, irréversibilité) sont
à la hauteur des promesses mesurées par les validations expérimentales du
protocole EMDR. Et, par un cercle vertueux, la plasticité de la démarche EMDR encourage
en retour l’inventivité du professionnel afin qu’il s’adapte, en s'appuyant sur son expérience clinique, à
l’expertise douloureuse et tenace que son client a de son propre problème.
La thérapie EMDR, ou
comment retrouver le LOL après un trauma.
Pour aller plus loin :
- Francine Shapiro, Dépasser le passé. Se libérer des souvenirs traumatisants avec l'EMDR, Seuil, 2014
- Francine Shapiro, Manuel d'EMDR. Principes, protocoles, procédures, InterEditions, 2007
- Francine Shapiro, Margot Silk Forrest, Des yeux pour guérir. EMDR : la thérapie pour surmonter l'angoisse, le stress et les traumatismes, Seuil, 2005
Pour aller plus loin :
- Francine Shapiro, Dépasser le passé. Se libérer des souvenirs traumatisants avec l'EMDR, Seuil, 2014
- Francine Shapiro, Manuel d'EMDR. Principes, protocoles, procédures, InterEditions, 2007
- Francine Shapiro, Margot Silk Forrest, Des yeux pour guérir. EMDR : la thérapie pour surmonter l'angoisse, le stress et les traumatismes, Seuil, 2005
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