samedi 8 juin 2013

Ouvrir mon carnet à spirales

Je reprends la plume de manière méthodique, après plusieurs années d'abstinence. Mon dernier ouvrage remonte à 2002. Il était consacré à la communication publique et à l'émancipation politique. Aujourd'hui, place à la communication thérapeutique et à l'identité personnelle.


Comment en suis-je arrivé là ?

En publiant le coeur spéculatif de mon doctorat en philosophie, je pensais sincèrement avoir atteint les limites de ce que je pouvais penser sur les fondements normatifs de l'espace public contemporain, dans la lignée de la Théorie critique de la société. Par congruence, il me restait à orchestrer l'institutionnalisation de ma visée théorique en organisant la constitutionnalisation du quatrième pouvoir depuis le mirador qu'est le Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Mon insupportable prétention à avoir raison trop tôt et à le faire savoir bruyamment m'a relégué dans le no man's land du conseil en stratégie et en organisation. Quelle aubaine pour y élaborer quelques projets fumeux sur l'intelligence collective : alchimie improbable des créatifs culturels, pionniers autoproclamés de la sobriété volontaire, de la collaboration entre auto-entrepreneurs faussement désintéressés, agglutinés sur des radeaux de la Méduse réhabilités en cabinets-experts, et des mirages techno-optimistes de l'Internet 2.0. pour tous. "Biloba", "PatchWorking" ou "InLoveMint" sont les rejetons de ma surchauffe neuronale.

Le syndrome de Münchausen a fait long feu. Peut-être n'en suis-je pas encore tout à fait guéri. J'y décèle une réclamation à être reconnu, aspiration à honorer aujourd'hui de manière plus écologique. Je reprends en tout cas goût à écrire et à penser en mon nom propre. Sans trop vite m'emballer dans une vocation mégalomaniaque à changer le monde, en me débattant dans mon verre d'eau. Tel Buzz l'Eclair qui, faute de s'envoler vers l'infini et au-delà, s'écrase avec panache sur la moquette.

L'usage des nouvelles applications sociales en ligne m'offre l'occasion d'expérimenter les promesses et les limites de la démocratie délibérative et d'accéder aux ressources partagées par les chercheurs intervenants dans ces pratiques de socialisation publiquement médiatisées. Cette actualisation du projet inachevé des Lumières renoue avec mes intérêts spéculatifs initiaux. Le dialogue avec mes étudiants de communication à l'ISFSC m'a confronté à l'impératif pratique de reformuler dans leurs termes le fragile héritage démocratique "Vieille Europe". Enfin, une discussion sans concession m'a permis de jeter un regard dans le rétroviseur et réaliser sereinement le deuil d'ambitions obsolètes.


Et après ?

Je me surprends aujourd'hui à dérouler ma pensée de manière non linéaire, sans exposer par le menu un plan déductif rigoureux. Je m'observe avec curiosité bavarder à voix haute à propos de ce que je suis devenu, en acceptant de faire simple là où je m'efforcais de faire compliqué. J'avoue avoir encore des efforts à faire pour être moins elliptique.

Ce carnet à spirales va s'enrichir au fil de l'eau : widgets ergonomiques et participatifs, retours d'expériences issus de ma clinique thérapeutique, notes de lectures personnelles, ressources méthodologiques éclectiques, développements théoriques et prolongements politiques. Seul objectif : déployer en toute transparence mon arrière-plan conceptuel et laisser fleurir mes arborescences spirituelles. Avantage pour moi : soulager les soutes de mon cerveau volant après chaque voyage. Bénéfice pour mes clients : m'interroger sur mon éthique professionnelle.

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